Sarcophiles et sarcophages

Il y a quand même quelque chose de tentant dans cette affaire.

Depuis Briscard Destin, aucun Président n'a gagné les élections, mais l'adversaire a perdu. Rendons-lui hommage, ce fut le triomphe du "Oui, mais!" et donc du scepticisme.

Depuis, la médiocratie n'a eu de cesse de progresser. On pensait les sommets atteints, au point que "l'homme normal" est apparu comme seule issue tangible, alternative nécessaire à d'éphémères rêves sur l'illusoire grandeur. Passons sur le fait que le faux modeste n'en eut que l'apparence, de la normalité: ce qui s'appelle tout simplement la banalité. Le Sarco, lui, fit merveille à cristalliser inimitiés et haines. Son alter EGO a choisi, de son côté, de triompher sur le terrain de l'insignifiance.

L'actuel titulaire a pulvérisé les scores. Rien de normal donc ne peut fonctionner dans cette affaire. Il arrive ainsi à perdre, tout seul, sans le moindre adversaire. Quel brio!

On peut présager que, rancuniers, aussi tenaces que la petite vérole, les deux voudront persévérer et garder ou récupérer la place qu'ils considèrent leur. Avouez que De Funès était plus drôle lorsqu'il pleurait "ma cassette" dans l'Avare.

Imaginez la lutte entre ces experts des profondeurs et de la désespérance: d'un côté les sarco-files, où s'aligneront bien quelques égarés, et de l'autre les sarcophages, dont on ne sait s'il dévoreront le corps du vaincu ou celui du vain coeur. Inutile de vouloir partager le cerveau.

L'important après tout doit être que tous deux s'accaparent la Cène vide, après avoir réussi à dévaster leur entourage et leur confrérie, technique nouvelle pour ruiner toute concurrence.

Lutte grandiose à prévoir entre ces génies des profondeurs.

Ne restera plus qu'à s'installer devant son écran, à manger des corn-flakes à TVA majorée.

A moins, me direz-vous, d'aller à la pêche?

Mais quel est donc ce vent d'incivisme refusant l'occasion suprême de la démocratie que constitue le moment du vote? On n'y voit d'ailleurs aucune raison. Ce qui prouve que, de l'incivisme à l'incivilité...